Alors que le télétravail s'est généralisé à marche forcée la relecture de cet arrêt de la chambre criminelle de la Cour de Cassation (Cass. crim., 19 févr. 2019, no18-83268) n'est pas inutile.
Cet arrêt date de plus d'un an mais il est paradoxalement plus actuel que jamais.
Que nous enseigne -t-il ?
Qu'une salariée, délégué commerciale, travaillant principalement à son domicile, s'était plaint de harcèlement moral à peine 6 mois après son embauche. La difficulté était que les faits reprochés se produisaient en l’absence de témoins.
Condamné en première instance du chef de harcèlement moral le prévenu est relaxé en appel et la partie civile déboutée de sa demande d'indemnisation de la faute commise par celui-ci. Cette solution est censurée par les juges de la chambre criminelle au visa de l’article 593 du Code de procédure pénale.
Les juges en appel ayant établi que le prévenu pouvait avoir un comportement inadapté, ils auraient dû rechercher si les faits poursuivis n'outrepassaient pas les limites du pouvoir de direction du prévenu et ne caractérisaient pas des agissements de harcèlement moral.
Il est également reproché aux juges du fond de ne pas avoir répondu aux conclusions de la partie civile soutenant qu'elle avait été isolée des autres salariés en raison de la demande de son employeur de travailler chez elle en télétravail, en contradiction avec sa fiche de poste.
Cette décision est donc particulièrement intéressante alors qu'on aborde une période de pérennisation et d'extension du télétravail : il ne doit pas conduire à isoler le salarié et la protection du salarié contre les faits de harcèlement doit être effective quand bien même il ne se trouve pas physiquement dans l'entreprise.
Petit nota bene : Étonnamment les faits dont se plaignait la victime relevaient davantage du harcèlement sexuel que moral ("droit de cuissage", allusions sexuelles) mais celle ci a préféré se placer sur le terrain du harcèlement moral
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